30 juin 2007

RFID

Déjeuner hier, à « l'heure de l'Apéri'TIC », un événement organisé par la Mêlée numérique, à Toulouse. Cela fut d'ailleurs l'occasion de rencontrer le président de la Mêlée, Édouard Forzy.

Le sujet de l'Apéri'TIC était le RFID. Vous savez, le truc qui utilise les radiofréquences pour, dans le meilleur des cas, remplacer les codes-barres. Les impacts technologiques sont nombreux, ainsi que les impacts sociaux. En effet, on peut imaginer — et même se rapprocher des expériences qui ont déjà lieu en ce sens — les scénarios suivants :
  • des produits de grande consommation contiennent une puce RFID passive. Plus besoin de scanner les codes-barres pour calculer le montant des achats, un simple scan du caddie suffit.
    On peut arguer que les caissières de supermarché y perdraient leur emploi, mais personnellement et brièvement, je ne vois pas en quoi ce serait forcément un mal d'épargner au genre humain ce genre de tâches répétitives et peu épanouissantes. Après, on pourra discuter sur l'hypothèse que tout métier qui disparaît se transforme ou non inévitablement en chômage.
  • des affiches de cinéma, de spectacles, de publicité, portent une puce RFID passive. On peut interroger cette puce (grâce à un téléphone portable par exemple, si vous en avez un) et enregistrer les coordonnées et les dates du spectacle, obtenir des détails sur les produits.
  • les objets acheminés d'un endroit à un autre portent une puce RFID passive. On peut facilement interroger ces puces et améliorer la traçabilité des objets en transit.
  • les animaux domestiques se voient implanter une puce RFID active. On peut ainsi savoir à tout instant où ils se trouvent.
  • des individus se font implanter une puce RFID active. Non seulement ils peuvent acheter leur baguette sans avoir à payer en monnaie (la puce RFID « dialogue » directement avec la borne de paiement de la boulangerie), mais ils n'ont plus besoin de carte d'identité (la puce RFID peut être interrogée à volonté par la maréchaussée, ni même besoin de prévenir le lundi matin lorsqu'ils sont bloqués dans un embouteillage (la puce RFID envoie d'elle-même cette information à leur patron).
On le voit, ce genre de technologie a un potentiel social « perturbateur » (sinon perturbant), voire disruptive.

Mais il y a un type d'impact dont on n'a pas parlé, or il me semble aveuglant : c'est celui sur la santé humaine et l'environnement vivant en général.

Étant moi-même électrosensible, je suis peut-être très bien placé pour en parler, ou au contraire très mal placé.

En tout état de cause, d'un pur point de vue de la gestion des risques, on voit qu'on est dans un scénario typique qui a déjà été vécu, en particulier pour la cigarette et pour l'amiante. D'un côté, une industrie qui, puissamment, inonde un marché, et tarit par tout un jeu de pressions les publications scientifiques qui iraient à contre-courant. De l'autre, des résultats scientifiques, épars et peu mis en valeurs, mais qui existent quand même, de façon incontestable, et prouvent que les radiofréquences GSM, par exemple, modifient la structure de l'ADN des cellules sanguines, et perméabilisent la barrière hémato-encéphalique.

Dire que ces effets révélés sont inquiétants relève de l'opinion. C'est en particulier la mienne. Je pourrais avoir raison, mais ce n'est pas le sujet.

Là où l'attitude est objective, c'est quand on constate que ces résultats sont fortement dévalorisés, minimisés, par un milieu soumis davantage à un mécanisme mercantile de l'économie qu'à l'éclairage des personnes. Pas de quoi fouetter un chat non plus jusque là. Sauf que, et c'est là que je m'insurge avec une bête objectivité, sauf que c'est le scénario qu'on a connu pour la cigarette et pour l'amiante, qu'on a vu quels risques cela induisait, et que pour les radiofréquences GSM ou Wi-Fi on refuse de gérer ce risque potentiel, risque précédemment avéré, je le répète, dans un même pattern de scénarios.

C'est-à-dire que même si ces radiofréquences ne présentent pas un risque sanitaire si important, le fait de ne pas adopter une démarche raisonnée et adulte de gestion du risque sur ce sujet, indique par nécessité qu'on ne prend pas la peine non plus de gérer le risque sur d'autres sujets, sujets nombreux vu l'actualité technologique et éventuellement encore moins sous les feux de la rampe que la téléphonie mobile et les RFIDs, et donc en particulier sur des sujets qui représentent un vrai danger. Je suis là au niveau de la bête statistique.

Croire que le principe de précaution signifie un repli obscurantiste, et qu'il vaut mieux être au chaud dans la religion du progrès, qu'au chaud dans le Moyen Âge de l'anti-progrès, relève à mon sens d'une vision faussée de ce qu'est par essence l'évolution. On ne peut pas juger l'évolution en train de se faire, on peut seulement agir au sein de cette évolution. Or ne souhaiter qu'être emporté dans un mouvement général de nouveautés, est tout sauf agissant.

Pour en revenir au principe de précaution : on m'a toujours dit que la prudence était une vertu — cardinale, même —, et je ne l'ai jamais vue comme une vertu passive... contrairement à certaines puces RFID :-)

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